La mission d'information sur le fonctionnement économique du football français ne se terminera qu'en septembre, mais déjà, un amateurisme incroyable est dénoncé en haut lieu, car il pourrait coûter très cher au football professionnel français.
La mission d’information lancée au Sénat sur la financiarisation du football français continue d’avancer et se conclura en septembre. De nombreuses personnalités du football français ont été entendues, et cela va continuer prochainement. Mais une première tendance est révélée par Michel Savin, sénateur de l’Isère et rapporteur de cette mission d’information, dont il a bien voulu se confier à L’Equipe. Et ce qui ressort de cette interview, c’est la facilité avec laquelle les présidents des clubs français ont confié sans trop regarder leur avenir financier à Vincent Labrune, et ont fermé les yeux pour approuver l’arrivée de CVC sur le très long terme pour empocher rapidement une somme d'argent. Un manque de professionnalisme presque aux yeux du sénateur de l’Isère, qui va demander des nouvelles explications aux intéressés, comme Waldemar Kita de Nantes ou Louis Nicollin de Montpellier, sur cette gestion à hauts risques et qui se retourne actuellement contre eux.
Droits TV : Vincent Labrune retire 5 euros https://t.co/BneGdjqrqN
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« Mercredi encore, les présidents Kita et Nicollin nous disaient qu'ils n'ont pas pris connaissance du pacte financier et du plan d'affaires de la société commerciale, alors que Vincent Labrune nous a affirmé que tous les présidents avaient eu connaissance de ces documents. Qu'autant d'argent soit entre les mains de responsables qui ne connaissent pas ou ne s'intéressent pas à ces éléments, cela nous interpelle. Tout comme le fait qu'ils fassent aveuglément confiance à quelques personnes. J'ai beaucoup de respect pour messieurs Kita et Nicollin car c'est leur argent personnel qu'ils investissent dans leur club mais il y a des choses qui nous semblent surprenantes », laisse ainsi entendre Michel Savin, pour qui les clubs n’ont absolument pas regardé les conséquences et ont laissé la Ligue signer avec CVC pour obtenir rapidement de l’argent en cash, sans se soucier du long terme.
Ils n’ont « pas fait attention » au salaire de Labrune
Un comportement assez déroutant pour le sénateur, pas loin de penser que les présidents de Ligue 1 ont signé sans regarder juste pour avoir l’argent. « Quand le Sénat a été amené à se prononcer sur la création de la société commerciale en 2022, notre question était de savoir si cela serait bénéfique pour le foot français. On nous avait dit que sa création avec l'arrivée de CVC allait amener de la compétence, notamment sur les droits télé. Or les présidents que l'on a vus n'ont pas la même vision, eux disent que leur priorité était l'apport de financements dans une situation d’urgence (…) Les clubs semblent avoir accordé une confiance excessive à la Ligue et ils ne sont pas autour de la table avec CVC au sein de la société commerciale, il n'y a que des représentants de la Ligue et de CVC. Quel est le pouvoir de la Ligue ? », s’interroge le rapporteur de la mission d’information, qui termine sur le salaire de Vincent Labrune qui est pour lui totalement disproportionné. Surtout qu’un parachute doré est prévu même s’il perd les prochaines élections, sans avoir démission ou avoir été remercié.
« Dans la mesure où il touche 1,2 M€ de salaire (annuel) et 1,5 M€ de prime correspondant à l'accord avec CVC soit 2,7 M€, ça lui ferait un parachute de 5,4 M€ à la charge de la Ligue. Quand on évoque ces chiffres avec les présidents, ils disent qu'ils n'ont pas fait attention à cet aspect et que Labrune a bien travaillé. Le président de la Ligue s'est engagé à mettre ce point à l'ordre du jour du prochain conseil d’administration. Quand on a voté le texte de la société commerciale notre objectif était qu'il serve les intérêts financiers des clubs et pas ceux des banques, des cabinets d'avocats ou de quelques dirigeants de la Ligue. 37,5 M€ de commissions ont été versés quand même », a souligné Michel Savin, qui conclue en n’hésitant pas à laisser entendre que les présidents de Ligue 1 ont fait preuve d’un amateurisme assez sidérant à ses yeux : « Les présidents de club ont des réussites professionnelles exceptionnelles pour certains, mais ils font confiance à des gens qui prennent des décisions potentiellement très lourdes pour eux, sans avoir de véritable contrôle. Une partie des présidents auditionnés n'a rien vérifié par excès de confiance ».