Depuis qu'il a été suspendu 90 jours par le comité d'éthique de la FIFA, Michel Platini était resté silencieux face aux accusations. Mais ce lundi, le patron de l'UEFA sort de son mutisme dans un entretien accordé au Monde. L'occasion pour lui de vider son sac et de confirmer son intention de briguer la présidence de la FIFA en 2016, malgré les menaces qui planent sur sa candidature.
« Si je vais être candidat ? En tout cas, j’en ai toujours envie ! (…) J’ai été suspendu pour trois mois mais ce qui m’énerve le plus, c’est d’être mis dans le même sac que les autres. Je trouve honteux d’être traîné dans la boue. Pour le reste, mes avocats suivent les procédures FIFA et saisiront le Tribunal arbitral du sport si nécessaire. J’espère que tout cela va aller vite. Je ne voudrais pas être dans la situation de Mohamed Bin Hammam qui, en 2011, s’est retrouvé suspendu avant les élections à la tête de la FIFA puis blanchi… trop tard, une fois la réélection de Blatter réglée », prévient, dans le quotidien du soir, Michel Platini, qui évoque ensuite les fameux 2 millions de francs suisses qu’il a encaissés en 2011 pour une mission effectuée en 2002.
Platini n'a rien volé à la FIFA et justifie son travail
« Blatter a été élu et j’ai commencé à travailler en septembre. Je travaille sur la réforme du calendrier mondial des compétitions, sur le « goal project », un dispositif d’aides et de soutien de la FIFA aux fédérations les plus pauvres dans le monde. Et puis, j’accompagne beaucoup Blatter dans ses voyages. Bref, je travaille vraiment et beaucoup de gens peuvent en témoigner. En fait, je travaille plusieurs mois sans rien toucher. Au bout d’un moment, je vais voir Blatter : « Tu as un problème pour me payer ? » Il me dit : « Oui. Je ne peux pas te payer 1 million à cause de la grille des salaires. Tu comprends, le secrétaire général gagne 300 000 francs suisses. Tu ne peux avoir plus de trois fois son salaire. Alors, on va te faire un contrat pour 300 000 francs suisses et on te donnera le solde plus tard. » C’est ce qui s’est passé. Seulement le plus tard n’est jamais venu (..) J’ai arrêté de travailler pour lui en juin 2002, au moment de mon entrée au comité exécutif de la FIFA. Je ne demande pas parce que je ne manque pas (…) Mais j’aurais mieux fait de demander une reconnaissance de dette et ainsi, rien de tout cela ne serait arrivé. J’ai demandé à mes services d’entrer en contact avec la direction des finances de la FIFA qui a demandé à Blatter s’il me devait de l’argent. Et il a dit oui. J’ai envoyé une facture à leur demande. Et là, je me suis trompé à mon détriment. Je ne me souvenais plus que j’avais été payé 300 000 francs suisses, je croyais qu’il s’agissait de 500 000 et qu’il me devait un rattrapage de 500 000 par quatre années. J’ai donc envoyé une facture de 2 millions. J’ai été payé dix jours plus tard sans que la FIFA fasse aucune difficulté et j’ai payé moi-même des charges et des impôts sur cette somme, tout à fait normalement », explique le président de l’UEFA, qui avoue avoir des doutes sur le fait que cette histoire sorte d’un seul coup, même s’il refuse d’accuser Sepp Blatter, tout en se posant quand même la question de savoir si tout cela est vraiment le hasard.
Le Qatar ? Platini assume et défend son fils
Autre question posée par Le Monde, celle concernant les rapports entre Michel Platini et le Qatar. Et là encore, le président de l’UEFA répond sans détour et en assumant totalement sa position, évoquant également son fils Laurent. « J’ai été le seul à avoir dit en toute transparence que j’avais voté pour le Qatar et le seul à raconter ce déjeuner à l’Elysée avec Nicolas Sarkozy et l’émir du Qatar que l’on m’a reproché ensuite comme si Sarkozy m’avait dit pour qui voter ! Mon honnêteté me nuit. La vérité est que j’ai voté parce que je voulais que la Coupe du monde ait lieu dans le Golfe, une zone où il existe un extraordinaire public de foot et qui ne l’a jamais eue. Mais il faut arrêter les préjugés ! Il y a trois heures de décalage horaire, on va jouer en hiver ce sera magnifique. Mon seul regret est qu’elle n’aura pas lieu dans tous les pays du Golfe pour des raisons géopolitiques (..) Mon fils travaille chez Burrda Sport détenu par le Qatar ? Mais cela n’a rien à voir avec la Coupe du monde ! C’est Sébastien Bazin qui lui a présenté l’équipementier et il y est entré un an et demi après le vote en faveur du Qatar. Il n’y a aucun conflit d’intérêts. Mon fils fait sa vie et je ne vais certainement pas intervenir dedans », prévient Michel Platini, qui ne veut pas qu’on l’accuse de tout et de n’importe quoi.