Le coup de froid entre Adrien Rabiot et le Paris Saint-Germain s’est transformé en tempête ces derniers jours.
Antero Henrique a officialisé la décision du joueur de refuser de signer un nouveau contrat et de partir libre en fin de saison. Vexé par cette sortie qui ne va pas lui rapporter un centime et surtout floué par le comportement du joueur qui a multiplié les prétextes pour refuser de prolonger, le dirigeant portugais a annoncé que Rabiot n’était pas prêt de rejouer avec le maillot parisien sur le dos. Une décision que beaucoup de supporters comprennent, estimant que l’international français était ingrat avec son club formateur. Légalement, le PSG a le droit de ne pas faire jouer Rabiot, la frontière entre la sanction sportive et la décision purement footballistique étant trop mince. Et tant que le club de la capitale lui fournit les mêmes prestations (entrainement, équipement, soin…) qu’aux autres professionnels, le PSG ne s’expose pas à grand chose. Même si annonçant ouvertement que Rabiot était mis au ban pour des raisons extra-sportives, Henrique n’a pas forcément été le plus malin à ce niveau. Dans les colonnes des Echos, deux avocats spécialisés se sont penchés sur cette situation, et estiment au final que le monde du football est tout de même assez fou, puisqu’un joueur qui respecte son contrat jusqu’au bout est considéré comme un paria.
« Six mois après avoir ému les Français en refusant le statut de suppléant en équipe de France, voilà qu'Adrien Rabiot fait à nouveau parler de lui pour un comportement supposé d'enfant gâté qui pourrait venir écorner une image déjà fragilisée. Pourtant, le natif de Saint-Maurice (Val-de-Marne), âgé de 23 ans, ne fait selon nous qu'exercer sa liberté. Joueur de football professionnel, Adrien Rabiot a, comme tout salarié, la liberté de ne pas renouveler son contrat à durée déterminée (...) Si l'activité et la rémunération d'un joueur de football professionnel font rêver et souvent perdre la tête, il n'en reste pas moins que la relation qui le lie avec son club n'est rien de moins que celle d'un salarié avec son employeur (...) Si le choix d'Adrien Rabiot a suscité de nombreuses critiques de la part de journalistes spécialisés et de supporters, son attitude contractuelle est pourtant irréprochable. A quoi sert-il de fixer une fin de contrat si dans tous les cas on s'émeut de la voir respecter ? Signer une prolongation de contrat est un droit, non pas un devoir, le joueur est libre de donner le sens qu'il souhaite à sa future carrière », expliquent ainsi Arnaud Touati et Louis Soris, avant de se pencher sur les cas similaires déjà étudiés par la Loi.
Rabiot coupable de respecter son contrat
« S'il n'en découle aucun droit fondamental de jouer, le sportif doit néanmoins se voir offrir, selon l'article L222-2-9 du Code du sport « des conditions de préparation et d'entraînement équivalentes à celles des autres sportifs professionnels salariés » du club. Sur ce point, un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de Cassation du 15 mai 2008 est allé plus loin et a émis l'hypothèse que l'employeur ne peut pas refuser d'inscrire le joueur sur les feuilles de matchs. Même si les faits relatifs à cet arrêt sont très particuliers et que la décision de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation pourrait difficilement s'appliquer au cas Rabiot, l'inclinaison de la Cour de Cassation de protéger les intérêts des sportifs professionnels pourrait conduire la jurisprudence à aller bien plus loin. En effet, ne pourrait-on pas considérer qu'en privant son joueur de compétition, délibérément et indépendamment de ses performances, le Paris Saint-Germain se mettrait en faute en ne permettant pas à son salarié d'exercer son métier ? Le débat est ouvert ! Les clubs de football professionnels doivent selon nous arrêter ce double discours, consistant à reprocher aux uns d'être des mercenaires et de forcer leur transfert en méconnaissant les termes de leur contrat et aux autres justement d'en respecter scrupuleusement lesdits termes. Usages d'un autre temps, le football professionnel est certainement l'un des rares domaines dans lequel vouloir respecter les termes de son contrat peut vous mettre, au ban et sur le banc... », expliquent ainsi ces deux avocats, pour qui les contrats n’ont clairement pas la même valeur dans le monde du football, que dans le reste de la société.