Vincent Duluc est présent à L'Equipe depuis de nombreuses années et il connaît mieux que quiconque la portée du derby ASSE-OL, lui qui a commencé sa carrière du côté de Lyon au Progrès. Alors, constatant que les deux clubs s'évertuent désormais à éviter les joutes verbales, Vincent Duluc regrette cette situation, même s'il admet que certains débordements peuvent expliquer cette prudence. Mais notre confrère veut que la passion soit toujours là dans ce vrai derby.
« Le foot, et quelques sports avec lui, est assez simple : c’est toujours nous contre les autres, quel que soit le nous, quels que soient les autres. La rivalité est l’essence du foot, qu’elle soit philosophique, géographique, historique, politique. Dans la manière si lisse de gérer le derby, certes agité ces dernières saisons par des bas du front équitablement dangereux et imbéciles, chacun semble avoir oublié que cette rivalité est une culture et une mémoire à entretenir. La limite sera toujours la bêtise, et la haine, sentiment fait d’écume, sans profondeur, n’est pas très intéressante. Mais la détestation, le mépris, le chambrage appliqués à un derby, sont paradoxalement des manières de vivre ensemble et d’avoir des histoires à partager plus tard (…) La rivalité est si indispensable au football, qu’en France il a fallu inventer de toutes pièces celle qui sépare, ou unit, au choix, l’OM et le PSG. Entre Saint-Étienne et Lyon, il n’y a rien à inventer, tout est là. Le folklore, le souvenir des banderoles dans les tribunes et sur les ponts d’autoroute au passage des cars des joueurs, les suprématies alternatives, ces villes fondamentalement différentes, la minière et la soyeuse qui ont, désormais, des supporters d’une même extraction (…) Le football a besoin d’électricité, de rivalité, de fixer des rendez-vous longtemps à l’avance dont les traces dépasseraient largement le jour d’après. Dans cette affaire, il faut éradiquer la bêtise, mais sauver tout le reste », écrit Vincent Duluc, qui se réjouit de voir que les supporters des deux clubs rivaux peuvent désormais se retrouver dans le même stade après une période d’interdiction.